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Les malades précieux, esika ya ba nkoma ya kosakana
14 novembre 2013

Les malades précieux, première!

Voilà!

C'est fait!

Je me lance moi aussi dans le "bloging littéraire". Oui, ce sera du 100% consacré à des oeuvres de fiction, comme je l'ai dit le billet issu de obambengakosso.unblog.fr annonçant la création de ce nouveau blog.


Romans, nouvelles, poèmes et pièces de théâtre: on parlera de fiction ici et rien que de fiction. Pour les essais, on va rester dans l'autre maison.

Pour la première, je ne me suis pas compliqué la vie en prenant un extrait de mon recueil de nouvelles, Les malades précieux. Il y 11 histoires dedans et j'ai choisi simplement la première, avec le début même de l'histoire. Le personnage central s'appelle Karumba et il se retrouve dans le village de son père, alors que non seulement il n'y avait jamais mis les pieds, mais de plus, il a toujours snobé les villageois.

Le titre de cette première nouvelle est Je n'ai plus de temps à perdre.

Buku (2)

Extrait: 

Depuis la fin de la guerre en octobre 1997, Karumba avait longtemps hésité à rentrer sur Deschavannesville. Il avait laissé aller et venir nombre de gens qui ne cessaient de lui dire que malgré tout, la vie avait repris et que, de toutes les façons, il avait intérêt à rentrer pour au moins aller assumer ses responsabilités de jeune papa. Si lui avait réussi à fuir vers l’Est avec ses deux filles de sept et quatre ans, sa compagne, Swui, n’avait pu suivre la même direction. Elle n’était pas comme lui de l’Est et par conséquent, elle avait toutes les chances de se faire malmener par les miliciens qui tenaient les quartiers Est de Deschavannesville et aussi tout l’Est du pays. Originaire de l’Ouest, elle avait suivi ses parents pour aller se réfugier dans la région d’origine de ces derniers. Elle l’avait fait la mort dans l'âme, car c’était pénible pour elle de laisser partir ses filles et son compagnon. À leurs âges, les gamines avaient plus besoin de leur maman que de leur papa, un homme pas toujours responsable. Mais elles avaient une tare difficile à masquer : elles ne portaient pas le même nom que leur maman, Swui. Or, les miliciens contrôlant les quartiers Ouest, et l’Ouest du pays aussi, étaient symétriquement les mêmes que ceux de l’autre côté. Ils commençaient à parler aux gens arrêtés sur les routes par la langue vernaculaire la plus couramment parlée dans le coin. Si l’on n’était pas capable de répondre, on pouvait avec de la chance se faire interroger dans une autre langue, mais parlée dans les régions sous contrôle. Quand la chance n’était pas au rendez-vous, soit les miliciens tapaient, soit ils violaient, soit ils tuaient. Ils étaient libres, leur pays leur avait appartenu cinq mois durant.

Karumba, assis sur une chaise en osier, pensait à sa compagne en même temps qu’une de ses tantes lui lavait ses filles. Il n’avait pas un sou en poche : comment rentrerait-il en ville ? Que donnerait-il comme argent à Swui, ne serait-ce que pour le premier repas ? Elle avait certes l’habitude de vivre ainsi avec cet homme qui n’avait pas de rentrées régulières d’argent. Mais bon…

Le village depuis des semaines voyait sa population diminuer inexorablement. Tous les citadins, arrivés ici accidentellement, car fuyant les combats violents de la capitale, avaient fait leurs bagages pour regagner leurs pénates. Karumba, incapable de faire quoi que ce soit de ses mains, avait surtout dû sa survie à l’aide de sa grand-mère, pourtant âgée de quatre-vingts ans. Chaque jour, elle lui apportait, pour lui et ses filles, une marmite de pondu(feuilles de manioc pilées puis cuites des heures durant) et du manioc. Pour la viande et les poissons, il ne fallait pas rêver : où en trouver ? Ceux qui avaient des sous pouvaient s’en acheter, car les prix avaient flambé à un point jamais connu dans ce petit village de deux mille habitants qui avec la guerre avait vu sa population multipliée par cinq. Au moins.

Karumba et ses filles avaient quitté la ville trois mois après le début des violentes hostilités. Ce qui fait qu’ils avaient passé deux mois au village. Deux mois durant lesquels les petites n’avaient cessé de réclamer leur maman. Obambe Gakosso, in "Les malades précieux". Tous droits réservés.

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Commentaires
Les malades précieux, esika ya ba nkoma ya kosakana
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